MEDITATION SUR
LE JUIF A LA THORA (MARC CHAGALL)
Deut 6,
4-9 ; Josué 1,9-10
La collection
Merzbacher est placée sous le signe de la fidélité .
La fidélité à la
foi , à la famille, à la couleur.
Il y a trois
semaines, le judaïsme célébrait La joie de la Thora, la grande fête qui clôt les célébrations du
Nouvel An, Yom Kippour et les Cabanes.
Dans la fête de
Simhat Thora, la joie de la Thora, on sort les rouleaux qui sont dans
l’armoire, l’arche des synagogues et on danse en les tenant dans les bras.
L’amour de la
Loi, l’amour du texte révélé, l’amour pour la parole qui met en marche, tout
est dans cette fête, mais aussi c’est le moment solennel de clore la lecture
synagogale du Pentateuque, avec la mort de Moïse et de recommencer tout le
cycle depuis la Genèse.
Le Pentateuque
est divisé en portions, qui sont lues à chaque shabbat, avec sa partie
correspondante dans les Prophètes, (ce qu’on retrouve lorsque Jésus entre à la
synagogue de Caphernaüm, on lui apporte le rouleau du Prophète Esaïe et il
annonce après : aujourd’hui, cette parole se réalise).
Cette tradition
de lecture a lieu dans le monde entier, depuis
Jérusalem jusqu’au plus petit village, comme l’était Vitebsk, la ville natale
de Chagall, depuis des millénaires.
Une lecture
inscrite dans le temps qui passe, qui rappelle la création , la lune, les
étoiles, l’arbre, le bouc.
Le main sur le
front rappelle la récitation du Schéma Israël, écoute Israël, la foi en un seul
Dieu, au nom imprononçable, qui aime et qui libère le peuple de l’esclavage,
qui rend la liberté, qui accompagne et inspire toute la vie.
Ces commandements que je te donne, tu les
inscriras sur ton front, en partant de
chez toi, sur ton chemin, sur tes portes, tu les enseigneras à tes enfants.
Il a son rouleau
dans sa main, il a la couleur de l’espoir, le vert, et le rouleau est rouge, le
sang, la vie, le bouc jaune à sa droite
rappelle cependant l’animal envoyé dans
le désert, chargé de tous les péchés du peuple, qui est devenu à son tour,
chargé de tous les maux de l’histoire, et qui reprend sans cesse la route de
l’exil, même en plein hiver.
Le bouc a la
forme de la lettre Beth, celle qui inaugure le Genèse.
Une lettre qui a
pour symbole le 2, la dualité de notre monde passionnant et tragique,
immensément riche et pauvre à la fois.
Le Beth signifie
aussi la maison.
Ici, juste
derrière le personnage : la maison qui a une cheminée qui fume, un foyer,
et à côté celle qui tient à peine debout, celle qu’il faudra peut-être quitter
un jour, pour reprendre la route de l’exil.
Le personnage a
aussi la forme d’une autre lettre, le Nun, dans sa forme allongée de fin de
mot, et en le lisant avec le Beth, cela forme le mot Ben, le fils. Tu
enseigneras à tes enfants….
Fidélité à la
foi, le chemin sans cesse recommencé.
La collection
Merzbacher , commencée par une famille qui
a souffert l’exil et la tragédie de la Shoa, mais qui a aussi trouvé la protection d’une famille suisse, qui
a respecté la foi des protégés, cette collection retrouvée après la guerre, est
aussi signe de fidélité à la famille disparue.
Une famille qui
a su surmonter la tragédie pour entrer sur le chemin de la générosité, du
partage.
Qui a transformé
le drame en énergie positive, qui a su relire, « je mets devant toi la vie
et la mort, choisis la vie », même si on t’a imposé la mort.
Recommencer,
recomposer, retrouver, continuer la collection, en mémoire de ceux qui ne sont
plus là, de ceux qui ont été écartés de l’Histoire.
Pour respecter,
perpétuer leur mémoire, crier au monde que leur vie ne sera jamais effacée.
Fidélité à la
couleur, un critère indispensable pour toute la collection : la couleur,
surmonter la noirceur des années de plomb, de nuit et brouillard.
On parle depuis
plusieurs années de chromothérapie, de couleurs qui stimulent nos sens, nous font
du bien, ne dit-on pas « se mettre au vert » quand on passe quelques
jours à la campagne pour se reposer ?
Souviens-toi,
rappelle-toi, sois fort et courageux.
Ne pas se
laisser aller lorsque tout se trouble, lorsque le tunnel parait sans issue.
« Que ce
livre de la loi ne s’éloigne pas de ta bouche, tu le reliras jour et nuit pour
veiller à mettre en pratique tout ce qui est écrit, le Seigneur ton Dieu est
avec toi partout où tu iras ».
Pour ceux
d’entre nous qui passons par le deuil, par le doute, par des difficultés qui
nous semblent insurmontables, la couleur des tableaux nous permet d’entrer dans
une dynamique de «guérison intérieure ».
Beaucoup d’entre
nous sommes ressortis de l’exposition avec le sentiment d’avoir reçu un vrai
cadeau, celui de la vie , celui de l’espérance. Merci.
Cap comentari:
Publica un comentari a l'entrada